
« Les déserts verts sont dénués d’intérêt pour les abeilles sauvages »
- Posted by rachel
- On 14 Oct, 2019
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Pourquoi les abeilles sauvages jouent-elles un rôle clé dans notre écosystème ? À quelles menaces les abeilles sauvages sont-elles exposées ? Notre cofondateur et biologiste Claudio Sedivy nous éclaire sur ces questions.
Tout le monde parle de disparition des insectes. Y a-t-il vraiment si peu d’insectes, si peu d’abeilles sauvages notamment ?
En fait, pratiquement aucune étude scientifique n’existe sur la question. Cela dit, les études qu’il y a brossent un tableau très sombre. Pourquoi ? De nombreuses espèces jadis répandues sont devenues rares. De plus, on observe une forte baisse en quantité chez presque toutes les espèces. Depuis les années 70, 30% de la masse d’insectes a disparu. Sur les quelque 700 espèces d’abeilles sauvages d’Europe centrale, près de la moitié figurent sur la liste rouge des espèces menacées d’extinction.
Quel rôle les abeilles sauvages jouent-elles dans l’écosystème ? Pourquoi sont-elles si importantes ?
En tant que pollinisatrices diversifiés et aussi très efficaces, les abeilles sauvages jouent un rôle clé dans notre écosystème. Elles veillent à ce que des milliers de plantes sauvages indigènes non seulement produisent des fruits et des graines, mais aussi puissent se reproduire. Sans les abeilles sauvages, de nombreuses plantes sauvages disparaîtraient assez rapidement, ce qui appauvrirait considérablement la biodiversité.
Quelles menaces pèsent sur les abeilles sauvages ?
Les abeilles sauvages ont besoin, pour vivre, d’une diversité d’habitats naturels ou quasi naturels. Elles se nourrissent d’une grande variété de fleurs sauvages indigènes. De nombreuses espèces, dont certaines sont rares, arrivent à s’épanouir éventuellement dans des zones habitées.
Cependant, ces habitats subissent de fortes pressions. Dans les zones agricoles, ce sont surtout les pesticides qui menacent les abeilles sauvages. Les insecticides hautement toxiques tels que les néonicotinoïdes peuvent tuer les abeilles sauvages, même à très faibles doses. Les herbicides peuvent être tout aussi nocifs. Ces herbicides détruisent toutes les « mauvaises herbes », qui devraient servir de base alimentaire aux populations locales d’abeilles sauvages.
Un autre problème souvent mal compris est celui des prairies de plus en plus intensivement fertilisées et souvent défrichées. Elles sont de plus en plus dominées par quelques espèces de graminées qui profitent le plus de l’apport excessif d’éléments nutritifs et chassent les plantes à fleurs comme le pissenlit, le cerfeuil des prés, le bouton d’or et la marguerite. Il en résulte des déserts verts et monotones qui, pour les abeilles sauvages, sont complètement dénués d’intérêt.
Les abeilles sauvages sont-elles aussi menacées dans les villes ?
Oui, même dans les zones urbaines où de nombreuses espèces d’abeilles sauvages se sont échappées, elles subissent encore des pressions. Les propriétaires de jardins injectent aussi souvent divers poisons, coupent et rasent les « mauvaises herbes » et font pousser des plantes exotiques comme les hortensias, les forsythias et les géraniums. Mais pour les abeilles sauvages, ces fleurs sont sans valeur. Les petites structures qui ont de la valeur, telles que le bois mort, les étendues de sable à découvert et les tiges de plantes sèches sont perçues comme laides et faisant désordre, et on fait tout pour s’en débarrasser. Pour résumer : les poisons, les prairies surfertilisées, les paysages vides et notre volonté de maintenir la nature « en ordre » à tout prix sont les plus grandes menaces pour nos abeilles sauvages.
Dr Claudio Sedivy

Dr Claudio Sedivy, expert biologiste
Les animaux et les plantes l’ont toujours fasciné. Né à Zurich en 1981, enfant déjà, Claudio Sedivy s’amuse à attraper des tritons pour les observer de plus près. Cet amoureux de la nature est avant tout impressionné par la richesse du monde végétal. C’est pourquoi il étudiera la biologie à l’ETH Zurich, où il terminera son doctorat sur les abeilles sauvages en 2012. Le botaniste veut tout savoir sur l’importance des insectes pour les plantes. Dans ses recherches, Claudio Sedivy découvre que dans les vergers, les abeilles maçonnes ont une capacité de pollinisation incroyable.
Son doctorat en poche, il décide de fonder l’entreprise Wildbiene + Partner à Zurich. Le concept : l’entreprise augmente le nombre d’abeilles maçonnes avec lesquelles les fruiticulteurs peuvent améliorer leurs récoltes grâce à une pollinisation optimale. En France, la filiale Pollinature SAS reprend ce concept qui a déjà fait ses preuves. Mais le Dr Claudio Sedivy ne s’intéresse pas qu’aux avantages pour l’agriculture. C’est pourquoi les particuliers aussi peuvent acheter une BeeHome, une maisonnette pour abeilles sauvages contenant une population d’abeilles maçonnes. D’après Claudio Sedivy, « Les gens devraient faire l’expérience par eux-mêmes de l’importance d’une biodiversité saine. Dans les villes aussi. »
Son engagement envers les abeilles sauvages et la diversité des plantes ne s’arrête pas à son engagement entrepreneurial. Quand il ne travaille pas, Claudio Sedivy va en montagne muni d’une épuisette pour cartographier la population actuelle d’abeilles sauvages, donner des conférences, créer des paradis pour abeilles sauvages et conseiller d’autres entreprises. Son objectif est le suivant : « La biodiversité doit avoir la même importance dans les discours sur le développement durable que l’énergie, la construction ou l’eau. »
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